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Économie bleue : Au chevet de l’océan, les Alumni du Cameroun tracent l’avenir

Ce jeudi 12 juin, l’Institut Français du Cameroun n’était pas seulement un lieu de culture, mais l’épicentre d’une mobilisation stratégique sans précédent pour l’avenir maritime du Cameroun. La « Journée France Alumni », orchestrée par l’Ambassade de France et Campus France, a transcendé le simple réseautage pour se muer en un véritable think-tank, un laboratoire d’idées où les compétences formées en France ont été mises au service d’une cause vitale : la sauvegarde de l’océan et l’édification d’une économie bleue durable. Entre tables rondes de haut vol, innovations locales et un avertissement poignant venu de la NASA, la journée a dessiné les contours d’une « communauté d’action » résolument tournée vers le futur.

Dès le matin, l’effervescence était palpable. Un écosystème dense d’experts, de chercheurs, d’entrepreneurs et d’acteurs institutionnels a animé les débats. Les tables rondes ont permis d’aborder des sujets aussi cruciaux que la gestion durable des ressources marines, les innovations prometteuses dans l’aquaculture ou encore les solutions pour des infrastructures portuaires respectueuses de l’environnement. Le « salon des innovations bleues », véritable vitrine du génie local, a démontré que le Cameroun ne manque ni d’idées ni de talents pour répondre aux défis maritimes. Mais c’est un atelier spécifique qui a véritablement cristallisé les enjeux de la journée : celui consacré à l’offre de formation, véritable clé de voûte de toute ambition dans l’économie bleue.

Forger les compétences de demain : Le face-à-face des offres de formation

Sous la houlette du Professeur Stéphanie Mailles Viard, Attachée de coopération scientifique et universitaire à l’Ambassade de France, cet atelier a été une plongée fascinante au cœur des métiers de la mer. Le Dr Félix Besack, de l’Université de Douala (ISH/ENSAHV), a dressé un panorama impressionnant des filières camerounaises. Loin des clichés, il a révélé une palette de métiers pointus : ingénieur en génie maritime et portuaire, ingénieur océanographe spécialisé dans la protection du littoral, et même le très moderne “Data Scientist” marin. Il a souligné que des institutions comme l’Institut des Sciences Halieutiques (ISH/ENSAHV) de Yabassi, l’ENSPD de Douala, etc., forment déjà les experts dont le pays a besoin. Le Dr Yves Mimbeu et son équipe de Polytechnique Douala, a enfoncé le clou en présentant les réalisations concrètes de son institution : des bateaux pour le transport de passagers, des navires environnementaux pour collecter les déchets plastiques, et même des prototypes capables de naviguer en zones ensablées grâce à une poussée des  vent savamment orchestrée.

En miroir, le Professeur Guillaume, Conseiller à l’Enseignement Supérieur, a présenté l’excellence de l’offre française, citant des pôles de référence mondiale comme Brest ou Metz. Son intervention a mis en lumière non pas une concurrence, mais une formidable complémentarité, esquissant les contours de coopérations renforcées, de doubles diplômes et d’échanges de savoir-faire pour outiller une jeunesse camerounaise prête à conquérir l’économie bleue.

L’Électrochoc de la NASA : « L’Océan va mal »

Mais la journée a connu son moment le plus intense, presque suspendu, lors de l’intervention de Babette Tchonang, data scientist à la NASA. Interrogée sur les données les plus alarmantes concernant l’océan, sa réponse fut directe, sans fard, mais empreinte d’une gravité touchante. « Oui, l’océan va mal, et ça va continuer d’aller mal si nous ne faisons rien, » a-t-elle lancé, non pour effrayer, mais pour provoquer une « prise de conscience ».

Elle a déroulé les faits, implacables : l’élévation du niveau de la mer due à la fonte des glaces en Arctique et en Antarctique, l’augmentation de la température des eaux qui dérègle les climats, provoquant « beaucoup de pluie, beaucoup de sécheresse ». Elle a pointé les causes, notamment l’impact humain : l’agriculture industrielle dont les produits chimiques « terminent dans les océans », et surtout, le fléau du plastique. « Pourquoi boire de l’eau dans une bouteille en plastique au lieu d’une bouteille en verre ? » a-t-elle questionné, évoquant l’image des plages camerounaises souillées. « Ce qui n’est pas recyclé finit dans les océans, est consommé par les poissons, et crée un déséquilibre total. »

Son message n’était cependant pas un cri de désespoir, mais un appel vibrant à la responsabilité individuelle et collective. « Chacun de nous a un rôle à jouer, qu’on soit océanographe ou pas. Où est-ce que tu jettes tes déchets ? Comment est-ce que tu utilises les plastiques ? Prenons soin de nos océans par les actions concrètes que nous prenons au quotidien. » Cet appel, porté par une scientifique de haut vol mais formulé avec des mots simples et directs, a profondément marqué l’auditoire.

En clôture de cette journée dense, la décision de former des groupes de travail pour bâtir une « communauté d’action » a pris tout son sens. Entre la cartographie des compétences, la vision des formations futures et l’urgence écologique rappelée avec force, le réseau France Alumni Cameroun a prouvé qu’il était bien plus qu’un simple annuaire d’anciens étudiants. Il est désormais une force vive, prête à s’engager concrètement pour que l’avenir du Cameroun s’écrive aussi en lettres bleues.

Jean Bosco BELL

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