ActualitésAnnonceCampuslife

Santé en Afrique : Quand la barrière de la langue devient une question de vie ou de mort

Un colloque international d’une importance capitale se prépare à l’Université de Douala. Du 12 au 14 mars 2026, chercheurs, praticiens et décideurs se pencheront sur un impensé tragique du système sanitaire africain : le fossé linguistique et culturel qui sépare soignants et soignés. L’événement, intitulé « Langue, Communication, et Prestation des Soins de Santé en Contexte Multiculturel », promet de mettre en lumière une réalité où une simple incompréhension peut mener à une erreur de diagnostic, voire au pire.

Le constat, dressé par les organisateurs, est sans appel. Dans la plupart des pays africains, le soin se « parle » dans une langue officielle, souvent l’héritage d’une puissance coloniale. Le cas du Cameroun est emblématique : avec 283 langues locales, la prestation des soins repose quasi-exclusivement sur le français et l’anglais. Or, le personnel médical, formé dans ces langues officielles, se retrouve face à une majorité de la population qui ne les maîtrise pas, ou pas suffisamment pour exprimer la subtilité d’un symptôme ou comprendre la complexité d’une prescription.

Cette « tour de Babel » médicale n’est pas sans conséquences. Elle engendre des ruptures de communication, des dépenses inutiles, des diagnostics erronés et, comme le souligne l’appel à contributions, contribue à des taux de mortalité élevés. La non prise en compte des perspectives culturelles, des valeurs et des croyances des patients aggrave encore ce fossé. Ignorer la perception culturelle d’une maladie ou le rôle du tradipraticien, c’est se priver d’une compréhension globale du patient.

Face à ce déficit criant de recherches sur le sujet en Afrique, ce colloque vise à créer un électrochoc. L’objectif est de rassembler des données ethnographiques et des bonnes pratiques pour enfin faire de la communication un pilier du soin. Les thèmes abordés sont aussi variés que cruciaux : choix de la langue à l’hôpital, communication entre patient et infirmier, place de la culture dans la formation du personnel de santé, discours sur la médecine occidentale face aux savoirs traditionnels, ou encore communication en temps de pandémie comme le VIH/SIDA et le COVID-19.

Les organisateurs encouragent vivement les études de cas, car c’est du terrain que viendra la lumière. Les conclusions de ces trois jours de débats ne resteront pas lettre morte : elles donneront lieu à une publication destinée à éclairer l’élaboration de politiques de santé plus efficaces et plus humaines. Car, comme le souligne la conférence, la langue n’est pas un détail technique dans le soin ; elle en est le cœur. Il est urgent que les systèmes de santé apprennent à parler toutes les langues de leurs patients.

Pour en savoir plus : https://campusunivers.com/wp-content/uploads/2025/06/Copy-of-International-Conference_New_version1.pdf

Jean Bosco BELL

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *