Conférence sur la durabilité de la pêche au Cameroun : Un appel urgent à l’action

Les 9 et 10 décembre 2024, la Société Camerounaise d’Halieutique (SCH) a organisé une conférence internationale à l’Alvi Hôtel de Douala. Placée sous le thème « Durabilité de la pêche au Cameroun : Pêche Illicite, Non Déclarée et Non Réglementée (INN) et Surpêche Industrielle en conflit avec la Pêche Artisanale », cette rencontre a rassemblé des experts, des décideurs, et des chercheurs pour examiner les défis auxquels le secteur halieutique camerounais est confronté.

La conférence a été officiellement lancée par le Pr Joseph Dika Manga, vice-recteur chargé de la recherche, de la coopération et des relations avec le monde des entreprises de l’Université de Douala, représentant le Recteur empêché. Dans son discours inaugural, il a salué l’engagement des participants à cette importante rencontre scientifique, soulignant que cette conférence arrive à point nommé pour « réfléchir collectivement aux solutions durables » à apporter aux crises qui secouent le secteur de la pêche au Cameroun. Le Pr Dika Manga a exhorté les experts à formuler des recommandations concrètes et actionnables pour la préservation des ressources maritimes.

Un appel à l’action collective

Le Pr Minette Tomedi Eyango épse TABI ABODO, Directeur de l’Institut des Sciences Halieutiques de l’Université de Douala à Yabassi et Présidente de la SCH, a ensuite pris la parole pour poser les bases de la réflexion. Elle a rappelé que la pêche INN et la surpêche industrielle « sont de véritables freins au développement du secteur halieutique au Cameroun ». Ces mauvaises pratiques, selon elle, ont un impact considérable sur la pêche artisanale, qui représente une source de subsistance pour de nombreuses communautés côtières.

Le Pr Tomedi Eyango a insisté sur l’urgence de protéger les écosystèmes marins décimés par ces pratiques. « Nos écosystèmes marins sont en péril, et cela a des conséquences graves sur l’économie et sur la survie des communautés côtières », a-t-elle averti, appelant à un renforcement de la coopération nationale et internationale pour préserver les ressources maritimes du pays.

Une coopération sous régionale incontournable

Moussa Mbengue, secrétaire exécutif de l’Association Ouest Africaine pour le Développement de la Pêche Artisanale (ADEPA), a quant à lui partagé l’expérience du Sénégal dans la gestion des aires marines protégées (AMP). Il a souligné que la cogestion des AMP au Sénégal a permis de restaurer les stocks halieutiques tout en assurant le développement économique des communautés locales.

« Il est difficile de lutter contre la pêche illicite à l’échelle d’un seul pays », a-t-il martelé, plaidant pour une coopération sous-régionale renforcée afin de lutter efficacement contre la pêche INN. Mbengue a également insisté sur le rôle central des communautés locales dans la gestion des ressources maritimes, affirmant que « les communautés doivent être au cœur des dispositifs de gestion, car elles sont les premières touchées par la surpêche et la pêche illicite ».

Une situation alarmante pour les ressources halieutiques

Le Cameroun produit en moyenne 295.000 tonnes de poissons par an, pour une demande nationale estimée à 500.000 tonnes, ce qui laisse un déficit significatif. Depuis 2023, le pays est suspendu sur la scène internationale en raison de ses pratiques de pêche non déclarée. Cette situation aggrave non seulement l’économie halieutique mais menace également la biodiversité marine, soulignant l’urgence d’agir pour redresser la situation.

Recommandations pour assurer la durabilité du secteur

Les participants à la conférence ont formulé plusieurs recommandations visant à inverser cette tendance :

  • Renforcer la surveillance de la pêche en impliquant les communautés locales dans la lutte contre la pêche illicite.
  • Aligner les programmes de formation des pêcheurs camerounais avec les normes internationales, notamment la Convention STCW-F.
  • Introduire des modules d’éducation bleue dans les programmes de formation pour sensibiliser les futures générations à la gestion durable des ressources maritimes.
  • Doter le Cameroun d’un bateau de recherche scientifique pour obtenir des données fiables sur les stocks halieutiques.

Un appel à la mobilisation générale

La Société Camerounaise d’Halieutique, par cette conférence, a lancé un signal d’alerte aux autorités et aux acteurs du secteur. Les interventions du Pr Dika Manga, du Pr Minette Tomedi Eyango et de Moussa Mbengue ont mis en lumière l’urgence de freiner la dégradation des ressources maritimes du Cameroun. En adoptant une gestion rigoureuse, participative et en renforçant la coopération régionale, le pays peut espérer un avenir durable pour son secteur halieutique.

Jean Bosco BELL

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