Sénégal, le Conseil Constitutionnel désavoue Macky Sall
Dans les méandres de l’élection présidentielle sénégalaise, les épisodes se suivent et ne se ressemblent pas. Depuis le report, le 03 février dernier, de l’élection présidentielle sénégalaise sensée se tenir le 25 du mois ayant vu le report acté, suivant le calendrier électoral, le Sénégal est plongé dans une crise politique sans précédente. Une crise qui a fait du Conseil Constitutionnel un acteur majeur du processus électoral, dont l’intervention, à travers un double désaveu à l’égard du président sortant, Macky Sall, s’est avérée quasiment salvatrice pour le Cheikh Anta Diop
Après que l’exécutif sénégalais avait unilatéralement décidé du report de l’élection présidentielle, fixant la nouvelle date au mois de décembre, les rues de Dakar, de Ziguinchor et d’autres grandes villes du pays vivaient désormais au rythme des manifestations quotidiennes, exigeant le respect du calendrier électoral et le départ du président Sall à l’expiration de son mandat. Cet embrassement des rues connaîtra une accalmie avec l’intervention du Conseil Constitutionnel. Les « sept sages » avaient, en effet, déclaré inconstitutionnel le décret annonçant le report du scrutin, et prolongeant de facto le mandat de l’actuel locataire du palais de la Nation, sensé s’achever le 02 avril prochain.
Prenant acte de la décision des gardiens de la Constitution, le président Macky Sall avait alors engagé un dialogue national voulu inclusif visant trois objectifs principaux:
- Primo, la détermination de la nouvelle date des élections. À ce titre, celle du 02 juin avait été proposée par le pouvoir. Une bonne partie de l’opposition, soupçonnant le président Sall de vouloir se maintenir au pouvoir par des voies inconstitutionnelles exigeait son départ à l’expiration de son mandat au soir du 02 avril à 23h59.
- Deuxio, la libération de tous les prisonniers d’opinion, dont le leader du Pastef, Ousmane Sonko et son premier vice-président Bassirou Diomaye, tous arrêtés dans le cadre des manifestations qui n’ont cessé de traverser le Sénégal tout au long du deuxième mandat du président Sall. Dans cette optique, une loi d’armistice formulée en termes de : « Tous les délits ou crimes, jugés ou non, commis entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024 et se rapportant à des manifestations ou ayant des motivations politiques » a été votée à l’issue du dialogue.
- Tertio, la coalition gouvernementale proposait également, dans une requête introduite lundi dernier auprès des garants de la Constitution, le réexamen des candidatures pour le scrutin à venir. En clair, il s’agissait d’aller au-delà des 19 candidatures jusqu’ici retenues pour ladite élection.
Dans une ordonnance rendue le mercredi, 06 mars, les sept sages ont entériné les principales propositions issues du dialogue national, notamment l’armistice, votée tard la nuit à l’Assemblée Nationale, enjoignant par la suite le pouvoir d’organiser le premier tour des élections au mois de mars, la date du 31 mars est explicitement indiquée alors que le pouvoir tablait désormais sur celle du 23 du même mois. Finalement les deux parties vont s’accorder pour la date du dimanche 24 mars 2024. En revanche, le Conseil Constitutionnel rejette la requête du président Sall demandant la ré-examination de la liste des candidatures et l’autorise par ailleurs à rester en place jusqu’à la prise de fonction du président qui sera élu à l’issue dudit scrutin.
Dans la foulée de cette décision, le gouvernement a été dissous, le Premier Ministre Amadou Bâ, candidat de la coalition gouvernementale Benno Bokk Yakaar (BBY), déchargé de ses fonctions afin de préparer au mieux sa campagne. C’est son Ministre de l’intérieur, Sidiki Kaba, qui a été désigné pour le remplacer à la Primature. Le Sénégal est perçu comme un modèle en Afrique francophone en matière de stabilité politique et institutionnelle.
NGUELIFACK Vijilin Cairtou