Sexe : dans le vagin, le système immunitaire est en ébullition après la première pénétration

L’activité du système immunitaire vaginal est significativement plus forte après le premier rapport sexuel avec pénétration qu’avant, démontre une étude. D’après les chercheurs, cette simili-inflammation pourrait signer un processus de maturation normal.

Lors d’un rapport sexuel, la pénétration semble provoquer une activité immunitaire accrue dans le vagin des jeunes femmes, conclut une étude publiée dans la revue eLife. Une constatation qui ne se veut pas alarmante, les chercheurs l’interprétant comme la maturation typique de l’environnement vaginal au début de la vie sexuelle. 

Les jeunes femmes sont plus à risque d’attraper une IST que les autres populations

Nous ne savons pas si ce que nous observons est un niveau d’inflammation nuisible ou s’il vaut mieux le considérer comme une simple augmentation de l’activité immunitaire”, précise le chercheur Sean Hughes, premier auteur de ces travaux. Une question importante, tant les adolescentes et les jeunes femmes “courent un risque disproportionné de contracter une infection sexuellement transmissible (IST) par rapport aux femmes plus âgées”, ajoute-t-il. En Afrique subsaharienne en 2017, les jeunes femmes de moins de 24 ans représentaient une nouvelle infection au VIH sur cinq, alors qu’elles ne constituent que 10 % de la population, rapporte l’Unaid. Difficile de dire pour l’instant si cette différence est due à des comportements plus risqués ou à une différence physiologique, par exemple au niveau de l’immunité, expose Sean Hughes. “Nous avons réalisé cette étude pour déterminer comment le fait de commencer à avoir des rapports sexuels affecte le système immunitaire dans le vagin.” 

Le système immunitaire plus actif après les premiers rapports

Au Kenya, où un quart des nouvelles infections concernent les 15-24 ans, 95 jeunes femmes de cette tranche d’âge ont été suivies par des prélèvements réguliers de leur environnement vaginal. “L’objectif de cette étude plus vaste était de déterminer l’ampleur de l’inflammation causée par le HSV-2 (virus de l’herpès génital, IST courante, ndlr) par rapport aux autres IST et à l’activité sexuelle en elle-même”, explique Sean Hughes. Dans chacun des 180 échantillons choisis, les chercheurs mesurent la concentration 19 molécules connues pour être des médiatrices des réactions immunitaires. Toutes ont augmenté dans les échantillons post-premier rapport sexuel avec pénétration, bien que de façon significative pour seulement 13 d’entre eux. 

En outre, l’augmentation s’intensifiait pendant la première année de vie sexuelle, rapporte les chercheurs. “Je pense qu’elle atteint un plateau avec une activité sexuelle régulière, mais nous n’avons pas de données pour déterminer combien de temps il faut pour atteindre ce plateau”, la plupart des échantillons ayant été prélevés environ deux mois après le début de la vie sexuelle, interprète Sean Hughes. Des résultats confirmés par deux autres études réalisées par d’autres équipes sur 18 Américaines et 93 Belges, et dont l’équipe dont fait partie Sean Hughes a réalisé la méta-analyse. 

L’hypothèse de la maturation de l’immunité vaginale

Âge, éducation, état de santé, niveau de vie, catégorie socio-professionnelle : aucun de ces paramètres ne modifie les observations des chercheurs, qui pensent donc – bien que l’étude ne permette pas de l’affirmer avec certitude – que le début de la vie sexuelle “pénétrative” est bien à l’origine de cette inflammation. “Mon hypothèse est que les rapports sexuels avec pénétration provoquent une exposition à de nombreux antigènes étrangers comme le sperme, les bactéries d’autres microbiotes, des lubrifiants ou des matériaux de préservatif”, énumère le scientifique. Cette exposition entraînerait alors la libération de médiateurs de l’immunité et le recrutement de cellules immunitaires. Pour Sean Hughes, il s’agirait d’”une sorte de maturation du système immunitaire local dans le vagin”. “Je pense qu’après un certain temps de vie sexuelle, un nouveau plateau stable d’activité immunitaire est atteint, plus élevé qu’avant l’activité sexuelle, mais n’augmentant plus de façon continue.” Difficile cependant de dire combien de temps serait nécessaire à cette stabilisation.  

Une suractivation protectrice face aux IST ? Pas sûr

Cette suractivité du système immunitaire signifie-t-elle un risque plus élevé ou plus faible de contracter une IST et peut-elle expliquer la vulnérabilité apparente des jeunes femmes ? Impossible à dire pour le moment, affirme Sean Hughes. Car si un surcroit de présence immunitaire dans le vagin pourrait mieux le protéger des infections, il pourrait également constituer une porte d’entrée pour certaines d’entre elles. Le VIH notamment infecte préférentiellement certains globules blancs – les cellules CD4 – qui seraient donc potentiellement présents en plus grands nombre chez les femmes sexuellement actives. 

Source :  Camille Gaubert, https://www.sciencesetavenir.fr/sante/sexualite/sexe-dans-le-vagin-le-systeme-immunitaire-est-en-ebullition-apres-la-premiere-penetration_167632

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